Puis, à Drancy, on s'entasse dans des wagons à bestiaux pour Auschwitz ... Beaucoup mourront de soif, de faim, d'épuisement avant d'arriver !
Une fois franchie le porte d'Auschwitz, l'enfer commence. Mais ce mot a-t-il désormais un sens ?

Les hommes ne sont plus des hommes ... ils sont devenus Nacht und Nebel !

Peut-être existe-t-il des mots pour décrire l'enfer. Pour Auschwitz, ils font cruellement défaut ! "Nuit et brouillard" viennent pourtant naturellement à la bouche. Ne sont-ils pas, à la fois, la parfaite illustration du "romantisme" nazi et l'expression de la plus intense douleur ?
Départ, en gare d'Oloron, pour un "camp d'accueil" : bien souvent le sinistre Drancy, l'antichambre de l'enfer !

Qu'on imagine maintenant un homme privé non seulement des êtres qu'il aime, mais de sa maison, de ses habitudes, de ses vêtements, de tout enfin, littéralement de tout ce qu'il possède : ce sera un homme vide, réduit à la souffrance et au besoin, dénué de tout discernement, oublieux de toute dignité : car il n'est pas rare, quand on a tout perdu, de se perdre soi-même ; ce sera un homme dont on pourra décider de la vie ou de la mort le cœur léger, sans aucune considération d'ordre humain, si ce n'est, tout au plus, le critère d'utilité. On comprendra alors le double sens du terme " camp d'extermination " et ce que nous entendons par l'expression " toucher le fond ".

Primo Levi